Avec des points de virages presque
identiques,
la stratégie
de vol peut être dictée par la position du terrain
d'arrivée.
départ Jaca retour Jaca
21 avril 2007
La bouillasse d’Oloron sèche lentement. Trop lentement au goût
des « fous furieux » (pour les nouveaux lecteurs, une définition
du terme a été donnée dans les pages campolaresques, il y a déjà
quelques années). Benoît qui a quelques jours de repos
programmés, a basé Delta India à Jaca pour la semaine, y faisant
une navette fatigante mais couronnée de 500s (lire circuits de
500 bornes).
Vendredi soir le planeur reste à Jaca, et Benoît m’y accompagne
ce samedi pour m’indroduire auprès du staff local et m’aider à
démonter le soir après le vol.
Deux heures de route depuis Pau ce n’est pas la mort. Anna, chef
pilote local qui vient de terminer le briefing, m’en fait
gentiment un sur mesure. Activité parachutage, réserve de
vautours au sud, rappel concernant les hauteurs de survol sur le
parc d’Ordesa (entendre « les hauteurs de raccrochage », because
on va transiter comme d’hab, sinon, le vol à voile en face sud
est mort. Y a des bureaucrates cons et ignares dans les bureaux
Madrilènes aussi, hélas.)
Décollage à une heure raisonnable, c’est à dire quand il y a des
matérialisations sur la colline au nord du terrain. Avec un
DR400 et pas de boue, pas de frayeur en bout de piste.
La stratégie du circuit est simple : 1ere branche à l’Ouest, car
les orages ne permettront pas une 3eme branche à L’Est. En fait
on verra plus tard que les orages ne permettront pas non plus de
dernière branche vers l’Ouest, mais bon. Sur la 1ere branche cap
à l’Ouest, je suis sans le savoir poursuivi un moment par Pierre
qui a décollé à la même heure sur la 07 à Oloron, avec le pégase
Fox Kilo. Effrayé par les grains (ça ne lui ressemble pas) et
sans contact radio avec moi (suis dans un silence parfait sur la
fréquence circuiteurs de Jaca) il abandonne la poursuite et met
cap à l’Est. En fait, je navigue au vent de congestus en
formation ( il y a 3 rangées parallèles), en faisant attention à
ne pas passer dans une zone d’ombre. Les plafonds descendant
progressivement, je fais demi-tour au Km 50 de Jaca avant le rio
Irati. Lassé du silence je farfouille sur nos fréquences
habituelles et découvre la présence de Pierre, qui m’avait vu
devant, mais pas pu me contacter. Et chacun fera son chemin cap
à l’Est avec une stratégie liée au retour. Pierre souhaite
rentrer à Oloron, il reste systématiquement sur la chaîne
centrale, J’ai ma remorque à Jaca, pas question de me laisser
enfermer au milieu, donc circuit coté sud.
Punta Suelza
(à gauche) et Posets (au fond)
Arrivé à Poset, il devient cependant évident que le risque
orageux n’est pas immédiat au vent, (par contre coté Nord, c’est
bien congestifié) et donc je rejoins les attirants plafonds
centraux (3500m, puis 3950m sous cumulus) au lieu des 2900m vers
le Mont Perdu.
Il y a du monde sur 122,65, et quand on est haut, ça porte loin.
Du coté d’Auch un ancien félicite un jeune qui a réussi à se
maintenir et à monter. Et le dialogue me fait remonter de vieux
souvenirs du début des années 80. Je suis entrain de me balader
sur les mythiques Encantats des récits de Salvador ou Jacques
Duran, que j’écoutais en me disant que je n’arriverai jamais à
ce niveau là de vol à voile pour pouvoir découvrir ces
incroyables paysages lointains (20 bornes au delà de la
frontière, au sud de St Girons), inaccessibles en K6 pour un
débutant. Depuis, j’ai découvert les faces Sud, à la poursuite
de Benoît en Pégase, et au départ d’Oloron.
Lac de San
Maurici
Et là
perché à 3900 mètres sur le Lac de San Maurici, je me dis que
d’une certaine façon je réalise un vieux rêve. Surprenant quand
on connaît le nombre de sacs que j’ai rempli lors de vols
pourtant pas forcément très turbulents. Ne désespérez pas les
jeunes ! On y arrive.
Glacier d'Aneto au loin à l'Ouest
et coté français bien couvert. Besiberri et plus au 1er plan
La douce voix de Sophie me tire de mes rêves, alors que j’ai
remis le cap à l’Ouest. Sophie a une alarme qui gueule, et ne
sait pas d’où ça vient. Je compatis in peto avec Sophie, que je
n’ai jamais eu le plaisir de rencontrer, car un bip inconnu
c’est exaspérant, et c’est en train de lui gâcher le plaisir
d’un vol avec vue sur les hauts sommets du Luchonnais. Après
quelques minutes, on apprend que c’était une fausse alarme due
aux AF. Trop modernes ces planeurs. Ceci étant, que celui qui
n’a jamais eu pendant un remorqué une sortie d’AF mal
verrouillés car trop durs jette le 1er cunimbe sur le concepteur
de ce bip.
Lacs de
Colomers
Avec l’Ouest en général et Jaca en particulier, on n’a
aucun contact radio. On est haut, on voit que vers le sud c’est
bleu, tout au moins au delà de rideaux de pluie sous des nuages
encore peu épais (en hauteur) .
On voit aussi qu’au Nord, les congestus de la crête ariègeoise
évoluent en cunimbes, ambiance.
Face Sud de Posets
A
Posets je vire plein Sud-Ouest pour contourner ce qui semble
bien fermé et humide sur l’axe Mont-Perdu-Collarada, admirant au
passage l’Ibon de Plan niché au pied de Cotiella.
En bordure des nuages et au soleil on ne tombe pas.
L’anticlinal de Boltana, curiosité géologique axée Nord-Sud
alors que toute la chaîne est presque Est-Ouest, est survolé
dare dare.
Anticlinal de
Boltana
Le centre de la chaîne semble praticable, Pierre qui a viré
Andorre-La-Vieille y chemine après Posets et rentrera à Oloron
en slalomant sous des bases à 2000m en face Nord. Le Mont Perdu
est sous la pluie, la Tendenera idem, il y a des éclairs sur la
Collorada, et Santa Cilia (contact enfin possible au Km 60 )
annonce un orage en formation au Sud du terrain.
ça devient chaud sur la Partacua.
On abandonne l’idée d’une dernière
branche à l’Ouest, d’autant que des rideaux de pluie
apparaissent sur Jaca. Cela crépite de plus en plus dans
la radio.
Il est temps de se poser à
Santa Cilia
Posé, démonté avant la pluie et au son de l’orage…. 388 bornes à
un train d’enfer et dans des varios enfin espagnols.
Le retour à Oloron s’est fait sous une pluie battante à Jaca,
insistante jusqu’à Accous. A Oloron, il ne pleuvait pas. La
piste serait-t-elle en voie d’assèchement ?
La vie est belle.