Dimanche 7 juillet
Récupération
des planeurs à Oloron.
La
station service dans la descente de Canfranc à Jaca est
fermée. Pourtant c'est un distributeur de grande marque.
C'est le premier signe visible de la crise qui touche
l'Espagne (on en verra d'autres) mais est aussi une
conséquence de l'augmentation de la fiscalité pétrolière
dans le pays. Le diesel est actuellement moins cher chez
Carrefour en France, que côté Espagnol.
L'autovia
mudéjar en construction, qui relie Valencia à Pampelune, a
un nouveau tronçon ouvert. Un viaduc permettra de passer
de la rive Nord à la rive sud du Rio Iraty. Sa hauteur
semble exagérée. Elle semble anticiper l'agrandissement de
la réserve d'eau de Yesa,
prévue et combattue de longue date par tag sur les
murs. Sera-t-elle un jour agrandie par rehaussement du
barrage? Le lac de Yesa est déjà le plus grand des
Pyrénées. Une réserve pour l'agriculture du bassin de
l'Ebre. Cette année, hiver et printemps pourris obligent,
il est à sa cote maxi, les arbres qui le bordent sont
noyés.
A
notre arrivée à Villacastin, Il fait plus de 30° à
21heures, et plus de 20° le lendemain matin.
L'adaptation à la chaleur va prendre deux jours.
Lundi 8 juillet
Montage
au calme, puis repos avant décollage. J'ai décidé le matin
que je ne mettrai en piste que si j'étais en forme
physique, tant pis si c'est un décollage tardif. En plus,
c'est du thermique pur, mais contrairement à l'an passé où
à même époque on a rampé, les sommets des pompes sont au
delà de l'altitude de vol maximale autorisée. Ayllon,
Sepulveda, Cuellar, Avila, et fin au km 50 à l'ouest. 319
km en thermique pur, ça commence très fort. Pas d'image,
mon appareil photo est resté à la casa rural. Il avait lui
aussi décidé un démarrage cool...
Mardi 9 juillet
Fort risque
d'orages. On démonte et on va à la piscine. Les orages
seront sur Gredos (violents vers Ocaña) et à l'Est de la
sierra. Rien d'orageux à Villacastin, mais une belle
confluence Nord-Sud aux bases très élevées s'installe vers
16h00, et donnera des orages en dérivant vers Madrid en
soirée.
Mercredi 10 juillet
Remontage.
Le cumulus sont de retour avec
des bases à 3500 mètres et 4200 mètres sous la confluence.
Mais en basses couches la visibilité est crapoteuse depuis
ce matin. Un gros incendie a eu lieu hier quelque part au
vent de Villacastin, et cela a dû brûler toute la nuit car
l'horizon au Nord est poussiéreux. J'ai d'abord cru a une
entrée "marine", enfin, une masse d'air différente et plus
humide. Robert qui forme des élèves dès le matin annonce
qu'il est à la limite de l'IFR, et qu'il est en passe
d'être fumé comme un jambon. Heureusement cette crasse
accumulée pendant la nuit dérive et se dilue vite avec le
démarrage de la convection, mais j'avoue avoir hésité à
décoller avant d'avoir la confirmation qu'il s'agissait de
fumée.
Le départ est facile, accrochage
dès la fin de treuillée, plafond légal atteint dans la
foulée, on est vite à Avila où l'on n'est plus limité en
altitude.
La présence de lotissements vide
à vocation industrielle ou d'habitation a proximité de
toutes les agglomérations d'une certaine taille est
frappante. Seul existe un maillage de routes goudronnées,
peintes avec parking handicapés et passages piétons tracés
sur un enrobé impeccable. La plupart sont là, inchangés
depuis plusieurs années. Celui de Villacastin existe
depuis que nous y venons voler, Arevalo a sa zone fantôme,
et la palme revient à Avila au trois quart cernée par des
lots fantômes. La dette de la ville doit être
proportionnelle à la surface préparée et inhabitée.
La suite de la promenade est
classique. Cap sur Gredos avec des bases de cumulus à 4200
mètres si on se place du bon coté de la confluence. La
zone entre Paramera et Gredos est la meilleure, plus à
l'Ouest les plafonds baissent.
Pour faire des kilomètres, il
fallut sauter sur la sierra de Bejar pour ensuite
récupérer un alignement de cumulus menant vers le
Portugal. Deux trous estimés à 12 et 15 km chacun. J'ai
sauté le premier mais pas essayé le second, les pompes
carrés et fugaces ne poussant pas à la témérité
Station de ski de la Covatilla
sur la sierra de Bejar. Sommet des remontées vers 2300
mètres
Le lac de Sta Theresa, et la
plaine irriguée de Salamanque en arrière plan
On rentrera
en faisant un détour par Arevalo qui est construite en
amont du confluent entre le rio Arevalillo et le rio
Adaja, qui ont entaillé un plateau formant un site facile
à défendre.
La zone industrielle installée vers le Nord-Ouest en bordure de la route de la Corogne est flanquée de son lotissement fantôme comme partout ailleurs.
Arevalo
L'altitude
maximale autorisée étant maintenue, on prolongera le vol
par Coca et Fuentemilanos, en faisant quelques images de
planeur au dessus du blé, sur fond de ligne TGV, avant une
arrivée avec
un plan confortable. 299 km sans stress. C'est comme cela
que j'aime la Castille.
Jeudi 11 juillet
Ce matin les
éoliennes tournent dans le bon sens, opposé à la manche à
air du terrain, ce qui laisse présager l'installation
d'une confluence ou au moins de cumulus du bon coté (le
nôtre) de la sierra. Bingo! La confluence est verticale
terrain. Tellement verticale qu'il faut retarder une
treuillée car une vingtaine de vautour sont en accrochage
sur la trajectoire.
On est prêt, ça déclenche
fort!
Mais les vautours sont nombreux sur la trajectoire de la
treuillée. Patience.
On décolle,
on monte et on fuit le congestus devenant cunimbe qui se
forme sur place, et pètera aussi sur place, avec vent fort
sur le terrain. On arrête la promenade vers Ayllon au km
121, car la voie vers Soria est bleue.
Ayllon.
La route vers Soria est dans le
bleu, et un cunimbe se forme au delà.
Sepulveda
Retour par
Sepulveda puis Cuellar avec un long plané avant de
retrouver une bonne pompe permettant d'aller voir les
nœuds ferroviaires de Medina del Campo (XXeme siècle) et
Olmedo (XXIeme siècle), excellents repères géographiques
pour le vélivole Castillan.
Medina del Campo. Le légendaire
Sud-Express reliant Lisbonne à Paris via Irun passe ici
chaque nuit
Olmedo et sa patte d'oie LGV.
La branche vers la Corogne n'est pas prête d''être
inaugurée. Les trains rapides vers le Nord Ouest
empruntent la vieille ligne, après avoir subit un
changement d'écartement bogie par bogie, la voie LGV
étant à l'écartement européen et non hispanique, plus
large.
En fin d'après midi on essaie toujours de prolonger
le vol, tout en assurant le local du terrain de
Villacastin. A l'Ouest il pleut. Mais en rejoignant la
sierra il est possible de faire une petite branche sur la
sierra d'Avila, tout en surveillant la dérive de la zone
de pluie située sur la plaine au nord.
Le pire scenario étant une
évolution en cunimbe se fixant sur le terrain, c'est alors
vache assurée hors zone orageuse. Heureusement la zone de
pluie située sur un axe Salamanque-Sanchidrian, avec un
noyau au km 40 semble dériver lentement. On aura le temps
de faire de jolies images du grain avant de rentrer en
sécurité se poser au calme. Le nuage se videra d'ailleurs
sur place sans arriver jusqu'à nous. 392 km tournés, on ne
va pas pleurer.
Ce soir, dîner chez les propriétaire du gîte que nous
louons depuis que nous volons à Villacastin (A Campolara
on campait en milieu isolé, et cela avait un charme fou).
Il y a eu du changement depuis l'an passé, et jusqu'à
notre arrivée on ne savait pas où on logerait! Mais la
fidélité entretien l'amitié, et de clients nous sommes
avec le temps devenus des amis d'outre Pyrénées. Les
affaires étant en déclin, Jorge, notre propriétaire a
repris le gîte pour en faire son bureau. Economie de
loyer. Il retape un autre gîte, et espérait qu'il serait
prêt à temps, mais rien n'étant prêt, il a fait
l'intermédiaire, sans rien nous dire, avec une autre
propriétaire, bref on était logé à l'arrivée, mais Jorge
et son épouse Maria-Louisia se sont fait un souci d'encre,
avec en plus une mère vieillissante dont il fallait
assurer un lieu de vie assisté. On apprend cela dans leur
patio, en dégustant des grillades arrosée d'un Tempranillo
experimental de fort bonne facture.
La situation espagnole actuelle fait que nous autres
vélivoles apportons un peu d'oxygène dans l'économie
locale, et les commerçants qui nous accueillent à bras
ouverts chaque année sont sidérés que nous soyons toujours
là, tels des oiseaux migrateurs, chaque année. Ne les
lâchons pas.
Vendredi 12 juillet
Grand tour de Castille. Les
ventilos tournent dans le bon sens, ce qui signifie que la
confluence sera du bon coté, et ça se vérifie. il faut
vite partir car ça va tourner au Cunimbe à Villacastin....
On s'en fout, on est loin quand cela pète.
15 mn séparent ces deux images
Sur la Salceda. Cela tournera
vite au cunimbe dans ce secteur. Il faudra rentrer par
un autre cheminement.
Comme la veille, après Ayllon,
pas de route vers Soria. En lieu et place du bleu, il y a
un congestus monstrueux, qui risque de gêner le retour
d'une branche sans potentiel. Je choisis donc un cap vers
Arenda, pour voir. Cela fait plusieurs années que je n'ai
pas réussi à me promener dans le Nord du terrain de jeu,
les conditions n'étant pas favorables, et surtout avec
toujours des retours long-courrier se terminant d'ailleurs
au tas.
L'embalse de Linares del Arroyo
est sur la route, avec Maderuelo posé sur un morceau de
plateau dominant
Echangeur en devenir entre l'A11
et l'autoroute Burgos-Madrid
Il y a encore du boulot avant que
ça ne soit opérationnel, et aucun engin de chantier n'est
visible sur le secteur en travaux. 10 ans plus tard l'A11
ne sera toujours pas achevé (note en date de
2023) Ensuite Arenda de Duero, je vous fait grâce
des images de lotissements fantômes,( il y en a) avec des
plafonds à plus de 3500m sous congestus.
L'autoroute Burgos-Madrid, entre Arenda et Lerma
Il faut jouer fin pour éviter la
pluie, et j'arrête à 30 bornes au Nord de Palencia, à
l'Ouest de Burgos. Ensuite cap au sud en survolant les
usines automobiles. Votre Renault a peut-être été
fabriquée ici.
Palencia, fief de l'industrie automobile
espagnole
rio Pisuerga et la prison de Dueńas
Tudela
de Duero
Valladolid
Passage par le sud de Valladolid en contournant la zone de
Madrid pour pouvoir conserver de l'altitude, et arriver au
bout de la Sierra d'Avila. Retour en finesse depuis le
dernier cumulus à 4000 mètres au km 55. 486 km tournés,
sans réelle difficulté. Au sud, Paramera et Gredos sont
dans le bleu.
Les ventilos de la sierra d'Avila sur fond de plaine
d'Avila
Congestus de fin de journée
vers Cuellar Jaune vert bleu: les couleurs d'été des
mesetas
Samedi 13 juillet
Dernier jour de vol.
Les cumulus apparaissent partout
autour du terrain, mais à plus de 25 km. On doit donc
monter dans le bleu avec un décollage vent plein travers
ce que personnellement je déteste, surtout au treuil. Ce
sera la journée la moins facile du séjour. Pierre
Martiquet largue de justesse au début de la treuillée, son
aile droite à fort dièdre relevée par le vent. Pas de
dégâts mais la balise métallique de bordure de piste (un
réel danger) n'était pas loin. Au deuxième essai, il
retombe vite par terre. Je décolle en dernier, et retombe
en 5 minutes, mais en contre QFU, il n'y a plus qu'à
tourner le planeur pour une deuxième tentative.
L'accrochage au deuxième essai est difficile, On rampe
longtemps à la limite du plan nécessaire à un retour en
sécurité, la Vz est faible et enfin ça monte en pur.
Ensuite il faudra faire 50 bornes vers le Nord avant de
trouver les cumulus et faire un plafond. Viré au km 90, à
Castronuño, sur la vallée du Duero, et le chantier à
l'abandon de la LGV vers la Galice. Il faut dire qu'en 20
ans de Castille, on a vu tous les grands chantiers qui
zèbrent les céréales: autoroutes, rocades, lotissements et
lignes à grande vitesse ont poussé comme des champignons.
Une année on a découvert le chantier d'un tunnel sortant
de la Guadarrama, puis ce fut la ligne grande vitesse vers
Valladolid. La crise que traverse l'Espagne se voit aussi
du ciel, à la vitesse d'avancement de ces grands
chantiers. Celui de la ligne Galicienne est en plan: le
ballast s'arrête sur l'image au pont, au delà, on a
seulement un terrassement sableux, qui sans une couverture
caillouteuse pourrait vite se dégrader.
Au
retour, mise en arrivée au km 50, à 4000 mètres d'altitude
pour une séquence en pur vol plané sous l'enclume d'un
cunimbe qui arrose le sud de la région de Salamanque.
Retour en finesse depuis
loin au Nord. Option de base: il n'y aura pas de pompe
sur le chemin du retour à cause de la tête de cunimbe
qui fait de l'ombre sur la route.
Et effectivement, c'est calme
C'est la Castille. Chez nous à
Oloron, l'arrivée d'un orage signifie retour au hangar, et
vite. Il n'y a pas d'alternative. Ici en juillet une zone
orageuse majeure est évidemment possible (on en a eu par
le passé) mais cette année, si les cunimbes ont été
quotidiens, il n'étaient pas fatals au vol à voile. Il
suffisait de les contourner, tout en surveillant une
évolution potentiellement désagréable: l'enclume peut
générer une ombre tueuse de convection assez loin du
noyau, et la pluie en fin de journée sur Villacastin est
éliminatoire ou pénalisable d'une vache hors zone de
rabattants. 202 km aujourd'hui.
Ce soir diner au routier qui jouxte le terrain. On a dû y
diner trois fois durant notre séjour. Effet crise? nous
étions souvent seuls, même avec un diner à l'heure
espagnole.
Bilan du séjour: lundi,
mercredi, jeudi, vendredi, samedi volé, soit 5 jours sur
6, avec des conditions vraiment castillanes celles que
j'avais eu lors de mon premier séjour à Campolara, en...
1993. Les 2 semaines qui ont suivi furent aussi
grandioses. De la grande Castille...