Considération
aérodynamiques par régime de sud
et chasse à l'abaque
24 novembre 2006
Je cherche une abaque. Peut être bien que je vais devoir la
construire moi même.
Le mécanisme du Foehn est bien connu des vélivoles, un peu moins
du grand public. Pourtant le phénomène a des effets bien
visibles de tous et parfois surprenants : l’air mort.
Lorsque le vent de Sud souffle, il y a sous le vent des Pyrénées
une zone d’ombre où l’air est immobile ou presque , que nous
appelons l’air mort : il est inutilisable pour le vélivole car
non convectif surtout en hiver. La force du vent est souvent
trop faible et sa direction parallèle au grand relief ne
favorise aucun site de pente permettant à un planeur de voyager.
Tout juste parfois trouve–t-on de quoi se maintenir en l’air,
mais bas.
Pour le grand public, il est difficile d’expliquer comment on a
retrouvé à Pont st Esprit, dans la vallée du Rhône, des ballons
d’un lâché à St Gaudens, que tout le monde avait vu emportés par
le vent vers Montréjeau situé à l’Ouest.
Je me suis souvent demandé pourquoi le vent souffle d’Est dans
l’air mort pendant qu’il est violent et de Sud au-dessus.
Peut-être tout simplement parce que le vent souffle de la haute
vers la basse pression, et que les lois de Coriolis ne
s’appliquent plus à petite échelle en basses couches. L’air s’y
déplace en ligne droite au lieu de tourner autour du point bas
de la dépression. Enfin le fait est là, le vent souffle d’Est en
Ouest dans l’air mort, si toutefois il daigne souffler.
L’épaisseur de l’air mort semble inversement proportionnelle à
la force du vent en altitude, et à la distance du relief : pour
un vent faible, l’air mort monte facilement à 1500 voire 1800
mètres immédiatement sous le vent de la chaîne. Si le vent en
altitude est très fort, l’air mort n’existe pas sur le piémont
immédiat, surtout en sortie de vallée. Oloron-Herrere est alors
dans la tourmente…. Mais pas forcément Pau, qui est situé en
aval d’un relief certes peu important (le chaînon de Belair)
mais qui protège la plaine.
Ainsi un avion en approche sur Papa Uniform peut-il avoir 25
Knts de vent traversier de Sud , alors que la tour d’Uzein passe
5 Knt de vent d’Est. Au même moment à Biarritz le vent est bel
et bien de Sud : pas d’air mort en aval d’un relief
insuffisamment élevé.
J’ai vu un soir un vol d’Air France louper son approche, vers la
piste 31 à Pau (par vent calme au sol, c’est l’axe vers le Nord
Ouest qui est utilisé), poussé par un composante arrière plus
que significative pendant la descente.
La direction du vent a aussi une influence sur la taille et la
forme du coin d’air mort, comme l’altitude variable en Est-Ouest
du haut relief . Par tempête de même force et de même direction,
St Gaudens peut être dans l’air mort, Oloron dans la tourmente.
St Gaudens est protégé par les sommets du Luchonnais, une belle
barrière de 3000 mètres de hauteur. Il n’y a aucune brèche à
moins de 2000 mètres d’altitude dans la chaîne, du Puymorens au
Pourtalet. Oloron est au débouché d’une vallée dont les
extrémités sont moins élevées (Somport, Pics Rouges…)
L’air mort peut cependant être cassé par une sortie de vallée
comme celle de la Neste au niveau du plateau de Lannemezan: il y
a un effet de chasse puissant.
Par régime de Sud-Ouest donc plus oblique par rapport à l’axe
presque Est-Ouest du relief (en fait 110°), Pau sera dans l’air
mort, Lacq, voire Uzein, situés alors sous le vent de reliefs
plus bas et plus éloignés n’y seront pas. L’air mort disparaît
avec la rotation du vent liée au passage de la perturbation.
Avec un vent du 250-260, il n'y a plus d’air mort en basse
couche.
Pour le grand public l’observation des effets du vent de sud
surprend toujours. Il y a bien sûr le trou de foehn (comment se
fait-il qu’il pleuve à Pau, et que le ciel soit bleu sur la
montagne ?) ou encore ces nuages immobiles en forme de
lentille, surtout au lever et coucher du soleil : le vent
de Sud nous donne les plus beaux crépuscules.
Un des effets les plus bizarres en hiver, est le réchauffement
temporaire de l’air sous les rafales de vent, la
température au sol retombant de plusieurs degrés après les
rafales. Autrement dit, lorsque le vent se lève, ça se réchauffe
! Peut-être est-ce une destruction locale de l’air mort frais
par le vent de Sud plus chaud. C’est spectaculaire une veille de
Noël (20° à 18 heures) ou un 24 novembre ! On ignore souvent
qu’à altitude identique, l’air est plus chaud sous le vent de la
chaîne. Il y a perdu de son humidité et gagné en température,
alors qu’il est déjà doux car venant du Sud, donnant cette
impression tropicale alors qu’on devrait avoir déjà sorti les
skis. Au passage on pourra remarquer que le malheur des uns (pas
de neige, pas ski, à cause du régime de Sud) fait le bonheur des
autres ( chouettes vols en onde grâce au régime de sud... enfin,
si on arrive à décoller)
foehn de nuit
18h03 le 24 novembre 2006 sur le coteau
au nord de Pau : le thermomètre de la voiture indique 22°
Mais revenons à nos préoccupations vélivoles.
Si le vent de Sud est faible, inutile de décoller. Les pentes ne
donneront pas, l’onde ne s’installera pas.
S’il est très fort, inutile d’aller au terrain : ouvrir les
portes du hangar (qui ouvre face au Sud) mettrait toute la
flotte de planeurs en péril. S’il n’y a pas d’air mort, ce sont
les décollages et attéros qui risquent d’être mortels.
Heureusement cette situation est exceptionnelle... bien que
rageante si elle tombe un week-end.
Tout le problème serait donc non seulement d’avoir des
prévisions de directions et de vitesse de vent fiables, mais
encore une sorte d’abaque nous donnant les plages de vitesse et
d’orientation de vent permettant d’espérer voler. Vmin (de
l’onde) Vmax (hangar fermé). Utile pour battre le rappel des
pilotes au prétexte qu'un journée fumante s'annonce, sans passer
pour un con ensuite enfermé à écouter le vent branler les portes
du hangar.
Si quelqu’un a des éléments chiffrés pour construire cette
abaque (qui n’est pas dans le Blanchard illustré) je suis
preneur.
Y a du boulot.